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L'évolution des installations temporaires de micromobilité

Temps de lecture 4 min.
Posté le 01.10.21
Mobility Insights
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Avec Axel Lambert, chef de projet au Club Villes et Territoires Cyclables : une association de collectivités locales, spécialisée dans le domaine de la mobilité active. Leur mission est de conseiller les collectivités dans l’élaboration de leurs politiques cyclistes et piétonnes.

Les installations temporaires et leur impact sur l’utilisation de la bicyclette

En avril 2021, il y aura entre 600 et 700 km d’installations temporaires sur le territoire français. Ces coronaires ont été mises en place car les collectivités s’inquiétaient de l’abandon des transports en commun au profit des déplacements en voiture.  En effet, la pandémie a conduit à l’abandon des transports en commun pour des raisons de promiscuité et de manque de distanciation sociale.

Face à cette pression, certaines collectivités n’ont pas hésité à mettre en place des aménagements temporaires – également appelés coronapistes – pour encourager la pratique du vélo. Si la France compte peu de coronapistes, elle dispose actuellement de 51 000 km de pistes cyclables et de voies vertes.

« Les coronapistes sont situées dans des zones stratégiques, certains kilomètres sont des ajouts sur des réseaux cyclables déjà existants ce qui a dynamisé la pratique du vélo. Ces aménagements ont accompagné le développement et l’augmentation significative de l’usage du vélo. C’est le cas dans de nombreuses villes comme Paris, Lyon ou Strasbourg. « En 2020, l’utilisation des aménagements cyclables a été estimée à plus de 27% », explique Axel.

D’autres initiatives ont également contribué à cette évolution, comme le « coup de pouce vélo », qui permettait aux Français de recevoir une subvention pouvant aller jusqu’à 50 euros pour la réparation d’un vélo.

 » L’étude menée par le Club Villes et Territoires Cyclables, à l’horizon 2020, indique que 148 collectivités interrogées sont intéressées par la question des coronaires et souhaitent développer des projets concrets. Sur ces 148 collectivités, 75% ont effectivement lancé un projet d’aménagement », précise Axel.

Différences entre les zones rurales et urbaines 

Ces aménagements temporaires sont un phénomène essentiellement urbain. Les aménagements cyclables transitoires ont été plus nombreux et plus avancés dans les grandes villes que dans les zones moins peuplées.

« En décembre 2020, 85 % des communautés urbaines interrogées avaient réalisé au moins une partie de leurs projets de coronaires, contre seulement 40 % des communautés rurales. En outre, trois fois plus de communautés urbaines que de communautés rurales ont déclaré avoir un projet de développement en cours. »

Les zones rurales ont moins de densité, moins de transports publics et moins de problèmes de santé liés à la promiscuité et à la crainte de la pollution par les véhicules à moteur. Dans le même temps, ces collectivités sont confrontées à davantage de difficultés techniques et budgétaires. Ce problème de ressources, et notamment de personnel, est d’ailleurs repris par l’État, qui a mis en place un certificat d’économie d’énergie – le programme AVELO 2 – qui permet d’aider et de cofinancer des actions de développement du vélo dans les zones peu denses.

 » Néanmoins, notre étude montre que plusieurs petits territoires – comme Bayeux, Charleville-Mézières ou Agnos – ont investi dans des projets d’aménagement de voies de transition pour les vélos mais aussi pour les piétons « , explique Axel.

Les héritages des aménagements temporaires pour les collectivités et les usagers

Il y en a plusieurs :

La durabilité : les collectivités s’engagent et investissent. En effet, la majorité d’entre elles ont lancé ces aménagements de manière temporaire et les ont trouvés efficaces. Elles ont donc décidé de les faire évoluer en remplaçant les balises et marquages jaunes par des aménagements plus qualitatifs.
Quelques exemples :
→ Lyon a approuvé la poursuite de 60 km d’aménagements cyclables et de transition.
→ Paris a maintenu l’ensemble des installations temporaires.
→ Saint-Malo, ville régionale, a aménagé une bande cyclable à double sens sur une route très fréquentée du Sillon et a décidé de transformer ce projet en projet urbain.
Certaines collectivités ont même décidé de développer des aménagements plus temporaires, comme le Creusot, qui a annoncé l’aménagement de plusieurs kilomètres de pistes cyclables.

Des aménagements cyclables innovants : ces expériences ont libéré l’imagination des collectivités, qui se sont orientées vers des aménagements ambitieux et inédits en France. Notamment des carrefours néerlandais avec des îlots sécurisés pour les cyclistes, comme au Havre, à la Porte de Saint-Cloud à Paris ou au carrefour Pompadour à Cergy.

  • Une autre conséquence positive est un mouvement vers la mobilité active : certaines collectivités n’ont pas aménagé de coronaires mais envisagent l’utilisation du vélo comme mode de transport. « Un cinquième des collectivités ayant répondu indiquent vouloir développer un schéma cyclable afin d’augmenter l’utilisation de ce moyen de transport. » déclare Axel.
  • Un changement dans la manière de construire les aménagements cyclables : les infrastructures sont créées et développées de manière opportuniste, et la méthode traditionnelle de construction d’une bande cyclable est assez longue, prenant en moyenne entre 2 et 4 ans. Avec les aménagements temporaires, les collectivités ont la possibilité de tester et d’expérimenter rapidement. Une piste cyclable peut être aménagée en quelques mois, évaluée par les usagers et diverses associations, modifiée, puis maintenue ou supprimée si elle est inadéquate.
    « Quatre-vingt-dix pour cent des collectivités ayant répondu à notre enquête souhaitent que cet urbanisme tactique, initialement lié à la pandémie, perdure et puisse être développé en permanence. »
  • La transformation du rapport à la démocratie locale :  » Pour un citoyen, il est compliqué de visualiser l’avenir concret d’un projet prévu et de se l’approprier, avec ces expérimentations il y a une véritable expérience utilisateur qui enrichit le débat public « . Plusieurs collectivités, comme Mulhouse ou la ville de Nantes, ont développé des processus participatifs pour évaluer les aménagements cyclables transitoires installés au sein de leur ville. »

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